The Sweet Melody of Resilience de Myhybris : l'histoire

Chapter 1 : Children’s games
Anne et Mathilde étaient deux adorables jumelles, toutes pétillantes de joie. Leurs parents les avaient confiées aux bons soins de M. Vinsberg, directeur du pensionnat Sainte Catherine, réputé sévère et peu patient.
Avant de les quitter, les parents des fillettes leur avaient offert une boîte à musique qui devait les maintenir proches malgré la distance les séparant : si l’absence se faisait trop cruelle, si la peine devenait trop profonde, Anne et Mathilde n’avaient qu’à remonter le mécanisme et se laisser porter par la mélodie au-delà de leur chagrin. D’un rouge flamboyant, la boîte avait un couvercle surmonté d’une délicate danseuse étoile, le tutu blanc et les chaussons rose perle soigneusement brodés à même son petit corps. Le mécanisme produisait une mélodie sublime qui avait sur les soeurs un pouvoir immédiat, si bien qu’elles finirent par ne plus s’en séparer. Plus qu’une boîte à musique, elle deviendrait l’objet de leurs joies et de leurs souvenirs, la concrétisation de leur relation si forte et singulière : la phrase que l’une commençait, l’autre la terminait, si l’une se faisait mal, l’autre pleurait…
Régulièrement de grandes journées sportives étaient organisées au pensionnat, l’occasion pour les jeunes filles de se mesurer les unes aux autres dans de nombreuses disciplines. En ce jour frais de novembre Anne et Mathilde, intrépides comme toutes jeunes filles de leur âge, choisirent de faire la course sur glace sur l’étang gelé derrière le bâtiment principal. Leur jeu favori était d’aller le plus loin possible avant que la mélodie de leur boîte ne s’éteigne.
Cette fois-ci, c’est Mathilde qui tient leur trésor écarlate entre ses mains. « Un, deux…trois … » Elle remonte le mécanisme et « Partez ! ». Dès les premières notes les fillettes s’élancent à toute allure sur la glace, lui imprimant de larges coups de patins. Il faut bien plusieurs secondes avant que l’une ne prenne un léger avantage : Anne peut désormais distinguer le ruban de soie noué dans les cheveux de sa sœur ! La mélodie touchant déjà presque à sa fin, elle patine de plus belle pour tâcher de la rattraper...
Dans leur course effrénée, les sœurs ne remarquèrent pas les craquelures qui dansaient sur la glace, se démultipliant et se rapprochant dangereusement d’elles telle une rangée de dents prête à les dévorer.
C’est Anne qui la première aperçut l’effroyable mâchoire s’ouvrir au-dessous d’elles. A peine le temps de pousser un cri que le lac les engloutit toutes deux dans un déchirement de glace. Le froid les saisit instantanément. Elles se débattaient furieusement sous le regard impuissant de leurs camarades pour échapper à cette gueule béante, luttant de toutes leurs forces pour tâcher de se raccrocher à la glace. Mais à peine parvenaient-elles à se hisser dessus qu’elle cédait de nouveau.
Il était déjà trop tard lorsque M. Vinsberg parvint jusqu’à elles. Lorsqu’il sortit de l’eau les petits corps pétrifiés, l’un d’eux s’était éteint à jamais. Insidieusement, l’obscurité s’était abattue sur ces êtres candides tel un lourd et épais brouillard.
Chapter 2 : The pursuit
Lorsque Anne rouvrit les yeux, épuisée par un sommeil opaque aux rêves tourmentés, un froid lugubre tournoyait tout autour d’elle. Encore engourdie, elle inspecta le lieu où elle se trouvait : la faible lueur laissait deviner une pièce exiguë dont les murs avaient pour tout ornement un simple miroir.
Cette sensation de malaise qu’elle éprouvait lui rappela soudainement la tragique course sur la glace. Dévorée par la douleur, elle s’empara de sa boîte à musique pour se réfugier dans le seul univers qui pouvait encore l’apaiser. Le son chaleureux s’éleva dans la pièce, s’insinuant dans ses moindres recoins jusqu’à saisir le cœur d’Anne comme pour continuer de le faire battre. Ce n’est qu’une fois apaisée qu’elle aperçut la porte entrouverte.
Elle risqua un regard furtif à l’extérieur : personne pour la surveiller. Elle ouvrit alors la porte plus largement et se retrouva sans même l’avoir imaginé dans le couloir désert. Elle se laissa guider par ses pas comme s’ils avaient leur volonté propre, errant à travers le dédale de corridors. Soudain elle se figea, la peau frissonnante et les sens en alerte. Là, dans le couloir obscur aux ombres difformes, l’odeur délicate de Mathilde venait de l’envelopper tel un voile exquis et confortable. Une douce torpeur l’envahissait, son cœur battait un peu plus vite, un peu plus fort…
« Tu es là ma sœur chérie, je te sens, je te sais près de moi ! ».
Mais l’instant d’après ce sentiment avait déjà disparu, il n’était plus que le vague souvenir d’une sensation…
« Je ne peux pas te laisser partir à nouveau, je t’en prie ne me quitte pas ! », hurla-t-elle dans un cri déchirant.
Anne se mit alors à poursuivre cette illusion dans tout le pensionnat, en courant plus vite qu’elle ne s’en croyait capable. Mais alors qu’elle atteignait le vaste hall d’entrée où chahutaient quelques élèves, M. Vinsberg surgit au même instant. Tétanisée, elle cessa même de respirer. Le directeur, visiblement préoccupé, s’arrêta tout aussi soudainement. « Puis-je avoir un peu de silence mesdemoiselles ? ».
Il scrutait la pièce de son regard perçant mais ses yeux ne s’arrêtèrent étrangement pas sur Anne. Ils lui coulèrent seulement dessus comme un ruisseau glacial. Elle attendit malgré tout qu’il reprenne son chemin et quitte la pièce avant de la traverser à son tour pour rejoindre la cour. Toutes les pensionnaires y étaient réunies : les unes jouaient à la marelle tandis que d’autres s’exerçaient au cerceau. Anne passa parmi elles sans même les effleurer, toujours à la recherche de la mémoire de sa sœur.
Mais quelque chose attira son attention. Plus précisément un ruban flottant dans une chevelure brune… « C’est le ruban de Mathilde ! Attends-moi ! »
Mais le morceau de soie s’éloignait déjà jusqu’à disparaître derrière un groupe de jeunes filles. La détresse la submergea totalement : elle reprit sa course éperdue dans le parc du pensionnat puis, folle de chagrin, s’engouffra de nouveau dans le bâtiment pour aller se réfugier dans la chambre sombre. Elle hurla son désespoir comme si cela pouvait déchirer sa peine, puis s’empara de la boîte à musique posée sur le lit et la jeta violemment contre le miroir.
Chapter 3 : The Sweet Melody of Resilience
Reprenant peu à peu ses esprits, elle releva lentement la tête jusqu’à apercevoir ses multiples reflets dans les restes du miroir. Mais ce n’est pas elle qu’elle y vit. Mathilde se tenait face à elle, la regardant de ses yeux tout aussi stupéfaits que réconfortants. Les jumelles restèrent un instant à s’observer, comme pour s’assurer que leur esprit ne les dupait pas.
Tout était plus lumineux autour de Mathilde : la lumière entrait largement par de grandes fenêtres apparues dans la pièce, les murs s’étaient éclaircis, le sol reluisait. Tout n’y était que calme et sérénité.
Anne, les yeux embués de larmes, s’adressa alors à sa sœur avec une infinie délicatesse :
- Qu’ai-je donc fait pour finir ici, seule et isolée ?
- Ma chère sœur, tu sais que personne ne peut y échapper.
- Vois-tu comme tout est mort ici sans toi, je suis perdue dans ces abîmes glacials.
- Tout ceci n’est qu’un mensonge Anne, je sais que tu te sens seule, mais c’est un mensonge.
Anne ne comprenait pas sa sœur, qu’est-ce qui était un mensonge ? Lentement, hésitante, elle avança une main vers le miroir jusqu’à toucher celle de Mathilde. Et là tout lui apparut distinctement. Elle se revit en train de se débattre dans l’étang, elle se souvint de sa sœur qui hurlait d’effroi… Mais celle-ci la regardait d’en haut, depuis la berge. Elle comprit alors que toute cette obscurité qui l’accompagnait, ce froid entêtant dont elle ne parvenait plus à se défaire, étaient ceux qui habitaient l’étang dans lequel elle avait sombré.
- La glace s’est brisée et nous a séparées
- L’une vit et l’autre meurt
- Mais nous saurons affronter nos peurs
- Le temps laissera s’installer la sérénité
- Je ne serai plus là pour grandir avec toi
- Nous avancerons dans deux mondes différents
- Mais écoute cette musique avec foi
- Car devant nous s’éveille l’aube de doux moments
- Je vais tomber dans l’oubli, je t’en prie souris-moi tant que je suis encore là.
- Je sais que tu as peur mais fais moi confiance, laisse toi couler dans cette douce chaleur.
- Je vais à présent disparaître. Regarde ma vie. Elle s’envole, ton sourire s’évapore…
Les deux sœurs s’échangèrent un dernier regard. Il n’était plus besoin de mots. Leur respiration à l’unisson, les mains encore jointes, elles fredonnèrent une dernière fois leur mélodie trésor avant de fermer les yeux.
Chapter 4 : The shining truth
Lorsqu’elle rouvrit les siens, Anne se demanda si elle avait rêvé cette rencontre avec sa sœur. Mais maintenant elle savait que non. Il était temps pour elle de cesser de poursuivre ses chimères et d’accepter enfin que son rôle s’achève ici, ou plutôt qu’il s’était achevé dans l’étang.
Une fissure apparut alors sur l’un des murs. D’abord timide et trébuchante, elle se mit à courir de plus en vite le long de la paroi jusqu’à se démultiplier en des dizaines d’autres fêlures arpentant la pièce entière. Les murs commencèrent à s’effondrer tout autour de la fillette, pour disparaître complètement.
Cependant Anne n’avait pas peur, au contraire elle ne s’était plus sentie aussi paisible depuis longtemps : une lumière éblouissante envahissait à présent la pièce tout comme son cœur, chassant les lambeaux de tristesse et de langueur qui pouvaient encore s’y raccrocher. Ses tourments disparurent avec les pierres des murs, ses angoisses se distordirent jusqu’à exploser. Il était temps de partir, il était temps de s’envoler, il était temps de sourire…